Le régime légal de la copropriété des brevets

Textes applicables : articles L.613-29 à L.613-32 et R.612-2 du Code de la propriété intellectuelle

Un régime dérogatoire du droit commun – La propriété d’un brevet est acquise par le dépôt de celui-ci auprès de l’INPI. Si ce dépôt est effectué au nom de plusieurs personnes : il y a alors copropriété.

Le code de la propriété intellectuelle organise aux articles L613-29 CPI à L613-32 CPI un régime légal de la copropriété des brevets, qui est dérogatoire du droit commun de l’indivision, et dont vous trouverez ci-dessous les principales caractéristiques.

Régime supplétif – Ce régime légal est un droit supplétif de la volonté des copropriétaires, qui ne s’applique que dans le cas où les parties n’ont pas réglé entre elles le régime de la copropriété.

Le contrat par lequel les parties aménagent entre elles l’exercice de la copropriété se dénomme traditionnellement le règlement de copropriété.

Principales caractéristiques du régime légal – Dépôt et gestion – L’article R612-2 CPI impose aux copropriétaires de nommer un mandataire commun. Ce mandataire est le seul en lien avec l’office pour toute la durée de la procédure, il accomplit tous les actes nécessaires à la délivrance du brevet.

Principales caractéristiques du régime légal – Exploitation – Chacun des copropriétaires peut exploiter l’invention à son profit sous réserve d’indemniser équitablement les autres copropriétaires qui n’exploitent pas personnellement l’invention et qui n’ont pas concédé de licences d’exploitation. A défaut d’accord sur l’indemnité, le recours au juge s’impose.

S’agissant des licences d’exploitation non exclusive, chacun des copropriétaires est libre d’en concéder sous réserve d’indemniser équitablement les autres copropriétaires qui n’exploitent pas personnellement l’invention et qui n’ont pas concédé de licences d’exploitation. Ici encore, à défaut d’accord sur l’indemnité, le recours au juge s’impose.

En outre, le projet de concession de licence doit être notifié préalablement aux autres copropriétaires. Cette notification doit être accompagnée d’une offre de cession de la quote-part de copropriété de celui qui désire accorder la licence et que l’un quelconque des copropriétaires doit acquérir (dans un délai de trois mois) si celui-ci entend s’opposer à la concession de licence. Ici encore, à défaut d’accord sur le prix d’achat, le recours au juge s’impose.

Une licence d’exploitation exclusive ne peut, elle, être accordée qu’avec l’accord de tous les copropriétaires. Il est néanmoins possible d’agir en justice afin d’outrepasser le refus injustifié de l’un des copropriétaires.

Principales caractéristiques du régime légal – Défense du brevet – Chacun des copropriétaires peut agir en contrefaçon à son profit mais doit notifier l’assignation délivrée aux autres copropriétaires. L’action en contrefaçon fait l’objet d’un sursis à statuer tant qu’il n’est pas justifié de cette notification.

Principales caractéristiques du régime légal – Sortie de la copropriété – L’article L.613-31 du CPI prévoit la possibilité pour un copropriétaire d’abandonner sa quote-part. Il devra le cas échéant notifier cette décision aux autres copropriétaires et l’inscrire au Registre national des brevets ou à l’Institut national de la propriété industrielle s’il s’agit d’une demande de brevet non publiée.

L’article L.613-29 e) prévoit également la possibilité pour un copropriétaire de céder sa quote-part. Le projet de cession doit alors être notifié aux copropriétaires dans un délai de trois mois. Ces derniers disposent alors d’un droit de préemption, étant précisé qu’en cas de défaut d’accord sur le prix entre copropriétaires, le recours au juge s’impose. A défaut d’exercice du droit de préemption, la cession de la quote-part à un tiers est possible.

Enfin, on précisera que la quote-part constituant un élément de l’actif du débiteur à disposition des créanciers, la saisie de celle-ci est possible.


Faiblesses du régime légal – Si le régime légal de la copropriété des brevets a le mérite de sortir cette question du régime peu satisfaisant du droit commun de l’indivision, les mécanismes d’indemnisation des copropriétaires non exploitants et du contrôle sur les licences d’exploitation le rende peu adapté à la vie économique. En outre, le régime légal est muet sur certains aspects fondamentaux de la copropriété : la répartition des quote-part de copropriété et la gestion des procédures de dépôt et d’extension des titres. Le recours à un règlement de copropriété, qui pourra aménager le régime légal et traiter l‘ensemble des questions que posent la copropriété, est dès lors fortement conseillé aux parties.